Le coup de foudre de Léa pour le Cap Corse ! ¹
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Photo d'Angèle Chavazas |
« La
Corse, je l’ai découverte par amour.
Dès nos premières rencontres, Raphaël
m’a dit : Il
faut que je t’emmène
voir mon paradis ».
Léa
SALAMÉ
Parution originale : Gri-Gri International [Lien]
La
jolie Léa avait l’habitude de passer ses vacances dans les îles
grecques. Mais depuis que Cupidon a fait feu de tout bois, la Corse
est devenue sa nouvelle île de coeur. Plus exactement le Cap Corse,
cette « île dans l'île ». Un choc. Stupéfiant !
Elle en parle avec des mots rares :
« C’est sans
doute l’endroit le plus sublime et le mieux conservé de la
Méditerranée. La minéralité, l’âpreté, la violence même de
la nature me désarçonnent à chaque fois ».
Sinon, plus
prosaïquement, c’est pour elle le moment hygiénique d’un grand
lavage de cerveau, dès qu’elle retrouve la douceur apaisante des
eaux turquoises, aux mille reflets argentés, qui longent les reliefs
rocailleux et torturés de la côte:
« Quand je la
regarde, quand je m’y baigne, j’ai la sensation de me laver de
tous mes soucis de l’année ».
Un
hameau pittoresque qui descend en pente douce vers la mer, où, au
couchant, l’astre du jour n’en finit pas de flamboyer...Nous
sommes à Marinca, marine de Canari, le paradis de Raphaël
Glucksmann. Point de problèmes ethniques de voisinage au sein de
cette petite « communauté de destin ». La quasi-totalité
de la population indigène a été chassée du paradis, par la
misère, l’exil, l’indivision, et leurs maisons rachetées et
restaurées avec tout le confort moderne par des étrangers, ou des
continentaux. Des pinzuti, comme on dit ici. Mais Léa et
Raphaël ne se considèrent pas comme tels. Et encore moins comme des
people. Ils aiment, une fois sortis de leur enclave, échanger avec
les gens du cru, tant qu’il y en a, et vivent simplement, posant
leurs serviettes à même le sable, au milieu de vacanciers qui ne
prêtent pas attention à eux. Le soir, ils vont déguster une soupe
de poisson à la table de la famille Morganti, à Albo ; ou une
côte de bœuf et une saucisse à la menthe chez Tony, à Canari.
« J’y pense déjà dans l’avion », avoue avec
gourmandise la journaliste politique, qui ajoute avec humour :
« Si
la mer est ma ligne d’horizon, l’ horizon de ma ligne est
tracé par ces deux grandes émotions culinaires». La
classe Léa !
Elle a le chic pour faire d’une silhouette
courte et en rien replète un atout charme, là où ses consœurs
sont en train de gémir sur leur IMC et de se soumettre à des
coaching estivaux sévères, à base de sacrifices caloriques.
Son
compagnon, légitimé par les deux générations familiales de colons
qui l’ont précédé à Marinca, se range parmi les arbitres élus
du goût et se plaît à délivrer des brevets de
capcorsitude:
« Pour moi, le monde se divise en deux
catégories, celle qui aime le Cap et celle qui ne l’aime pas ».
On reconnaît bien là l’intransigeance binaire de notre jeune
député européen engagé au service de la liberté, lui qui, en
Ukraine, avait courageusement soutenu le camp américain et ses
alliés néo-nazis contre les menaces impérialistes de l’autocrate
Poutine. Mais qui n’aime pas le Cap, d’ailleurs ? Ce n’est
nullement le cas, on l’imagine, de gens du même monde, des
académiciens Jean-Marie Rouart et Barbara Cassin, du penseur pour
dames Frédéric Lenoir, ou de tant d’autres célébrités,
lesquels ont, eux-aussi, choisi d’y construire leur paradis. Non.
Seulement le fait de quelques franchouillards râleurs et bouffeurs
de pizzas, style sac-au-dos et chaussettes enfilées dans les
sandales, qui se plaignent des monceaux d’algues sur les plages,
des médusent dans la mer, de l’anarchie des transports, des prix,
de l’accueil. . . Et - un comble ! - s’offusquent du
racisme antifrançais dont ils seraient les victimes. Ils imposent
leur sans-gêne partout et incommodent notre homme de gauche et
écologiste, hostile à un tourisme de masse symbole de pollution,
néfaste à la Corse et à son environnement et même nuisible
culturellement, l’exemple déplorable de ces débrayés mal éduqués
tirant la population autochtone vers le bas. Le Front Populaire, dans
sa folle générosité, aurait-il pu anticiper un tel saccage
esthétique et l’incidence désastreuse des hordes de congés payés
sur la préservation du patrimoine commun – sans parler des
enjeux planétaires ?
Rien
à voir, est-il besoin de le préciser, avec l’humble attitude d’un
couple imprégné de l’âme des lieux, et qui sait se faire discret
et respectueux face à la beauté sauvage de Mère Nature :
« Sur
la route de Marinca, nous nous arrêtons régulièrement, juste pour
regarder en silence ».
Pas de mots pour le dire. La
Corse se mérite. Alors les caravanes peuvent bien passer, avec, dans
leurs sillages, ces meutes braillardes vomies chaque jour, matin,
midi et soir, par les ferrys. Aucune espèce invasive ne parviendra à
troubler ces purs moments de grâce partagés. L’homme des justes
causes et sa mie – une femme puissante - , seuls au monde, en
totale fusion.
À
Rogliano, sur la côte est du Cap , les anciens se souviennent
de Raphaël. Encore gamin, il venait, avec ses cousins, profiter de
la légendaire hospitalité insulaire, chez le père d’une amie de
leur âge. C’était le prétexte à de périlleuses excursions dans
le maquis, d’où il revenait harassé, couvert d’égratignures
et, quoique le benjamin de la bande, la mine vaillante. Bon sang ne
saurait mentir. Nul doute que le petit Gabriel, l’enfant de l’amour
qu’il a eu avec Léa, soit déjà un Capcorsin d’adoption dans le
coeur de la minorité de souche résiduelle mais conquise des
Marincais..
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Détournement du portrait de Corse-Matin (2- 07- 2019)
François
de Negroni
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